vendredi 17 décembre 2010

L'ingénieur, le génie, la machine ? - D'Auguste Comte à la Technoscience et l'Intelligence Collective - Yves MICHAUD - 59 mn - UTLS - 2000



Une conférence du cycle : Qu'est-ce qu'un ingénieur aujourd'hui ? L'ingénieur, le génie, la machine
Organisé du 10 au 14 janvier et du 16 au 19 janvier 2010
Disciplines : Philosophie, Outils et méthodes de l'ingénieur, Sciences humaines et sociales pour l'ingénieur
Durée du programme : 59 mn - Date de réalisation : 19/01/2010 - Réalisateur : Université de Tous Les Savoirs

Conférence : "Ingénieurs et société : d'Auguste Comte à la Technoscience et à l'Intelligence collective" par Yves Michaud
- Introduction
- L'utilité du savoir
- L'illusion technocratique
- Perspectives et défis contemporains
- Conclusion

I – L'utilité du savoir
Au 17ème siècle, dans un texte aujourd'hui surprenant du chapitre 10 du Léviathan, paru en 1651, Thomas Hobbes passe en revue les divers pouvoirs: pouvoirs naturels, richesses, réputation, chance, beauté (promesse de choses bonnes, qui plaît aux femmes et aux étrangers), etc. Quand il en vient aux sciences, il estime qu’elles ne constituent pas un bien grand pouvoir parce qu’elles ne sont ni assez répandues ni assez reconnaissables : il n’y a, selon lui, pas assez d’hommes assez savants pour savoir reconnaître la science et la distinguer des diverses sortes de fausse science (on pense, bien sûr, à la magie et à la sorcellerie toujours répandues à l’époque). Hobbes admet tout juste l’importance et l’efficacité de quelques connaissances appliquées comme l’art des fortifications et des machines de guerre. On sait que les premiers ingénieurs furent des ingénieurs de la marine, des ingénieurs militaires et des ingénieurs des ponts et chaussées.
Ces vues de Hobbes témoignent du statut encore obscur, isolé et marginal de la science à son époque, un statut qui ne commencera vraiment à changer qu’avec la création de la Royal Society dans les années 1670, puis le triomphe de la mécanique de Newton en 1686.
Pour nous, les choses se présentent sous un jour bien différent.
Les besoins sociaux (ou ce que nous nous imaginons qu’ils doivent être avec, chacun, notre compétence très variable) commandent les orientations de la recherche à travers les politiques scientifiques publiques. Les applications techniques sont omniprésentes dans notre vie quotidienne. Elles entraînent la recherche aussi bien en termes d’application que d’effets en retour sur les connaissances fondamentales.
Cet effet de circularité est bien décrit par la notion de technoscience, introduite à la fin des années 1970: "la technique constitue le “milieu naturel” de développement et aussi le principe moteur de la recherche scientifique" (Gilbert Hottois, Le signe et la technique. La philosophie à l’épreuve de la technique, Paris, Aubier Montaigne, Coll. «Res - L’invention philosophique», 1984, p.59-60). En 1991, Larousse sera le premier dictionnaire français à introduire le substantif technoscience.
Avant l’ère technoscientifique, la science produisait certes des techniques, mais elle visait avant tout la quête désintéressée du savoir. Les Grecs méprisaient ouvertement la technique, plaçant la vie contemplative ou théorétique au sommet de la hiérarchie des finalités humaines. Au 17ème siècle, des auteurs comme Descartes et Bacon commencent l’apologie de la technique en cherchant à la rapprocher de la science pour mieux maîtriser les conditions de la vie et du travail. L'Encyclopédie de d'Alembert et Diderot publiée entre 1751 et 1772 célèbre les techniques mais ce sont souvent encore des techniques préscientifiques ou le perfectionnement des arts et métiers traditionnels. En réalité, c’est lors de la deuxième Révolution industrielle, dans les années 1830-1870, que se dessine la naissance de la technoscience. C'est à cette même époque que l'ingénieur prend son importance, que la notion commence à être théorisée et la formation organisée.
Aujourd’hui, l’activité scientifique produit non seulement du savoir mais des savoirs matérialisés en technologies qui, en retour, modifient l’activité scientifique, notamment en fournissant des outils chaque jour plus complexes et puissants de recherche générant en boucle des innovations. Qu'on songe aux effets théoriques des observations du télescope en orbite Hubble ou aux techniques de manipulation nanométriques des atomes. Du coup, la distinction familière entre recherche fondamentale et recherche appliquée devient floue et, surtout, elle se présente de manière nouvelle : une partie de la science s’applique et une autre reste "pure" - mais on ne sait jamais trop bien de quel côté va se trouver l’innovation marquante.
La technoscience va de pair avec le capitalisme cognitif.
Le capitalisme a toujours eu une base cognitive à travers les innovations techniques pour rendre le travail plus productif et augmenter les taux de profit. Ce capitalisme "pré-cognitif" a passé le relais à la fin du 20ème siècle à un capitalisme pleinement cognitif caractéristique d’une société postindustrielle et globalisée. Il est significatif qu’en mars 2000 le Conseil européen de Lisbonne ait fixé pour objectif à l’Europe de "devenir l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde". Instauré en 2000, l’"espace européen de la recherche", transpose la stratégie de Lisbonne au plan de la recherche en visant à "construire le “marché commun” de la recherche et de l’innovation, à l’image de celui qui a été créé dans le secteur des biens et des service". La technoscience se voit ainsi placée au cœur de la stratégie de croissance d’une société de la connaissance.
La suite de transcription de la conférence : D'Auguste Comte à la technoscience et l'intelligence collective

Intervenant : Yves Michaud
Statut :
- Professeur de Philosophie à l'Université de Rouen,
- Directeur de Programme au Collège International de Philosophie,
- Président de la Commission Art du Centre National du Livre,
- Chargé de la programmation et de la coordination de l'Université de tous les savoirs auprès de la Mission pour la célébration de l'an 2000
- Concepteur de l'Université de tous les savoirs et des forums de la démocratie et du savoir.

Diplômes : Ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure de la rue d'Ulm, Agrégé de Philosophie, Docteur ès-Lettres.

Parcours :
Depuis 1996, de nouveau professeur de philosophie à l'université de Paris 1.
- 1989-1996 : Directeur de l'Ecole Nationale des Beaux-Arts (2/10/89 au 31/12/95).
- 1985-1989 : Professeur de Philosophie à l'Université de Paris I
- 1981-1985 : Professeur de Philosophie à l'Université de Rouen.
- 1981 : Docteur ès-Lettres et sciences humaines de l'Université de Paris Sorbonne (thèse sur Empirisme, Analyse et Philosophie chez David Hume, sous la direction du Professeur Suzanne Bachelard).
- 1970-1981 : Assistant puis maître-assistant à l'Université de Montpellier III.
- 1968 : Agrégé de Philosophie.
- 1964-1969 : Etudes de Philosophie et de sciences à la Sorbonne, à l'ENS, et à la Faculté des sciences d'Orsay.

Prix : Chevalier de la Légion d'Honneur, Officier des Arts et Lettres.
Spécialités : Spécialiste de Hume, Locke, de philosophie politique, et de la violence en particulier

Source Canal-U TV - UTLS : D'Auguste Comte à la technoscience et l'intelligence collective - Yves Michaud

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